BERTON Vincent
GEOFFROY Eric

Maîtrise de Biologie des Populations et des Ecosystèmes
Université Claude Bernard Lyon 1
Automne 1997

 

 

 Eco-Ethologie

 

 

SYSTEMES D’APPARIEMENT

CHEZ LE DAIM (Dama dama)

Etude du groupe du Parc de la Tête d’Or

   

   

     

Introduction

 

Introduction

Matériel et Méthode

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Résultats

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Discussion

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Conclusion

Références

La sélection naturelle va dans le sens de la conservation des individus les plus adaptés. Lorsqu'un nouveau comportement apparaît, si il permet d'améliorer la fitness et (ou) le succès reproducteur, il se maintiendra, à condition qu'il soit génétiquement régit. Ainsi, au fil des générations, la compétition (intra ou interspécifique) se fera sur des critères de plus en plus pointus.

D'après Darwin, la sélection sexuelle se superpose à la sélection naturelle  et, dans des cas extrêmes, des individus peu adaptés à leur environnement peuvent fixer leurs gènes si des critères leur permettent d'avoir une abondante progéniture.

Différentes stratégies peuvent être élaborées pour l'accès à la reproduction. Plusieurs se rencontrent chez le daim : elles peuvent être liées au territoire ou pas. En milieu naturel, les populations peuvent être amenées à se déplacer périodiquement pour les ressources alimentaires. Dans ces conditions, il n'y a pas de territorialité. Les populations sont alors organisées en escorte (mâle suivant un groupe de femelles dans l'intention de copuler),harem (le mâle est plus ou moins intégré au groupe de femelles) ou groupe hiérarchisé (groupe de plusieurs femelles et mâles, ces derniers étant dominés par un individu reproducteur). Ces deux derniers types de stratégie sont fréquents en milieu à végétation basse (Braza et al.,1986)

Pour des populations plus sédentaires, les formations se font en postes (permanents ou temporaires, représentent des territoires non contigus défendus par des mâles solitaires et comportent éventuellement des ressources alimentaires, le poste temporaire n'étant défendu que quelques heures dans la journée) ou en leks (les mâles défendent des territoires contigus, dépourvus de ressource alimentaire). Les formations en leks sont généralement liées à un fort couvert végétal (Apollonio et al., 1992).

 

En dehors de la période de reproduction, les daims vivent généralement en grandes hardes de femelles avec leur progéniture, les mâles étant à part, par petits groupes. C'est vers la deuxième quinzaine d'octobre que débute la période du rut. Elle donne lieu à un regroupement des deux sexes  et une augmentation de l'agressivité entre les mâles. Les affrontements aboutissent à une hiérarchisation qui permettrait au mâle dominant d'accéder aux femelles. Les mâles font alors tout pour se faire repérer des femelles, s'exposant autant à elles qu'aux prédateurs. Il y a également des risques de blessure lors des combats et le coût énergétique pour s'assurer une descendance peut être énorme. Les femelles sont aussi actrices de la sélection sexuelle. Si elles veulent avoir une progéniture de qualité et plusieurs générations de descendants, elles doivent choisir des mâles intéressant, d'autant qu'elles n'ont qu'un petit par an.

A partir d'observations de la population captive du Parc de la Tête d'Or, parc à très forte densité, on pourra voir si le système d'appariement est identique à ceux des milieux naturels. On tentera de décomposer la mise en place de la hiérarchie. On vérifiera ensuite si la dominance est liée à l'agressivité et si c'est elle qui régit  le succès reproducteur et d'autres facteurs comme le maquillage et l'occupation de l'espace.

 

MATERIEL ET METHODE

 

Introduction

Matériel et Méthode

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Résultats

Discussion

Conclusion

Références

  Le groupe de daims du parc de la Tête d’Or est issu d'une vingtaine de géniteurs, introduits au siècle dernier. Il est constitué d’environ 150 animaux captifs, certainement génétiquement proche bien que fitness et fécondité restent élevées (seul la taille des nouveaux nés parait inférieure à celle de populations sauvages), logés dans un enclos rectangulaire de 2 hectares. Le sol est herbeux et quelques zones sont pauvrement plantées. Les promeneurs peuvent, comme nous, longer le parc sur trois de ses faces. Sur le parc, les animaux disposent d’un abreuvoir, d’un râtelier à fourrage garni en permanence et d’un abri sommaire pour la pluie (qu’ils occupent rarement). Des aliments frais (morceaux de légumes et fruits) ainsi que des granulés leur sont distribués de bon matin.

   Phénologie du rut

  A partir d’études antérieures relatant la période à laquelle les comportements reproducteurs ont lieu (vers la deuxième moitié d’octobre) nous déterminons que c’est début octobre qu'il faut commencer les observations. Des photos récentes (les bois étant renouvelés chaque année) permettent de différencier les mâles adultes (caractérisés entre autres par leur goitre développé et leurs bois à large empaumure) qui sont «baptisés ». Leur reconnaissance individuelle est basée sur des signes particuliers, essentiellement la forme et l’asymétrie des bois qui sont très variables.

La première étape d’observation est l’entraînement à la reconnaissance des daims et prend au moins deux heures.

La deuxième, à partir du 9 novembre et par sessions de 2 heures, trois fois par semaine, est le relevé de la distribution spatiale des mâles connus (les adultes), tous les quarts d’heure, sur un plan schématique et découpé en huit zones de repérage.

Parallèlement, tous les comportements agressifs sont placés sur le plan et notés avec la première lettre du nom des antagonistes. On relève également le type de comportement agonistique (entraînement, poursuite, combat ou agression de sub-adultes). Les observations, éparses au début (une fois la première semaine, deux fois la seconde), s’intensifient en s’approchant du rut. Lorsque arrivent les montes, elles sont à leur tour notées avec le nom de l'effecteur. Il en sera également ainsi pour les copulations lorsque celles-ci commenceront et, ceci indiquant le rut, l’observation en continu sur la phase diurne débutera. Le temps passé à chaque observation sera noté afin de transformer les données en fréquences horaires pour chaque type d'activité.

 

Matériel et Méthode

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Hiérarchie

  Les interactions agonistiques de chaque individu sont reportées dans des matrices de dominance (une par semaine et une comportant la totalité des observations) faisant apparaître les combats perdus en ligne et ceux gagnés en colonne (Annexes XXX, matrices 95, 96, 97).

Ces matrices permettent d'établir les diagrammes de flux qui mettent en évidence les relations de dominance entre les mâles et le nombre d'interactions qu'ils ont eu.

 

Afin de disposer de valeurs quantitatives concernant la hiérarchie, l'indice de Clutton-Brock est calculé:

 

iCB(x)=B+Sb+1 / (L+Sl+1)

   

B=nombre d'individus contre lesquels l'individu x a gagné plus de fois qu'il n'a perdu

Sb=nombre d'individus inférieurs aux B individus, jamais inférieurs à x, un même individu ne pouvant être deux fois au numérateur.

L= nombre d'individus contre lesquels l'individu x a perdu plus de fois qu'il n'a gagné

Sl=nombre d'individus supérieurs aux B individus, jamais supérieurs à x, un même individu ne pouvant être deux fois au dénominateur.

 

Cet indice tient compte du nombre de daims hiérarchiquement inférieurs (daims vaincus ainsi que de ceux qu'ils dominaient) et du nombre de daims hiérarchiquement supérieurs (ceux directement supérieurs ainsi que de ceux qui les dominent).

 

Les indices sont calculés sur la matrice totale de cette année et des deux précédentes. Les indices peuvent être confrontés au diagramme de flux, au succès reproducteur, au maquillage,...

 

Matériel et Méthode

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

 

  Evolution du maquillage

  Le maquillage de la face et du plastron (pelage enduit d'une croûte boueuse) est relevé avec la date et le nom de chaque individu.

 

Matériel et Méthode

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Occupation de l'espace

Les données concernant la localisation des mâles sont regroupées:

-en quatre zones pour voir l'évolution de leur fréquentation

-en deux zones pour tester la différence de distribution de la totalité de la harde puis de dominants et de dominés avant et pendant le rut.

 

Résultats

 

Introduction

Matériel et Méthode

Résultats

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Discussion

Conclusion

Références

Phénologie du rut

 

Figure 1: Evolution de la fréquence des comportements agonistiques

 

On note une augmentation de la fréquence des comportements agonistiques jusqu'au 27 Octobre puis une diminution en fin de pré-rut. Ces données contiennent également les agressions de sub-adultes qui représentent environ 70% des comportements agonistiques le 27 Octobre. Pendant la phase du rut, une augmentation de la fréquence des combats et des poursuites a été observée mais n'a pas été quantifiée (aucun relevé le 1 Novembre et un seul de deux heures le 2 Novembre).

Le graphe suivant permet de faire la distinction entre les trois types de comportements agonistiques concernant les adultes:

 

 

Figure 2: Evolution de la fréquence de chaque type de comportements agonistiques

 

La fréquence des entraînements est la plus élevée le 20 Octobre, celle des poursuites le 27 et celle des combats le 30 et pendant la phase du rut (non quantifiée).


   

Figure 3: Evolution de la fréquence des montes et des copulations

 

Le nombre de montes augmente brusquement entre les 24 et 27 Octobre et reste élevé lors du rut. Les copulations commencent le 2 Novembre, onze sont comptabilisées sur la journée et sont le fait de sept mâles différents.

 

Résultats

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Hiérarchie

  Les matrices de dominance (cf. Annexe 1) rendent bien compte de l'augmentation de l'agressivité puisque sur l'ensemble du pré-rut (du 6 au 26 Octobre), 55 comportements agonistiques ont été observés contre 91 pour le rut (du 27 Octobre au 2 Novembre).

Les diagrammes de flux (Figures 4; 5; 6 p.5,7 et 8) montrent que Kaki est dominant la dernière semaine alors qu'il a très peu interagi les semaines précédantes. En effet, lors du pré-rut, il n'est qu'en huitième position et, les mâles qui semblent s'imposer sont Gaston et Ding-dong. Pendant cette période, bien que Kaki ait très peu interagi, il n'a jamais été dominé. En revanche, lors du rut, il s'impose devant Ding-dong et Gaston. Sur la totalité de la période, l'ordre hiérarchique est le suivant:

 

K>D>G>F>E>J>A>M>H>B>I>L>Q>C>P

 

On note une discordance entre cette hiérarchie, basée uniquement sur les interactions dominantes des mâles et celle établie d'après l'indice de Clutton-Brock (1991) (calculs détaillés et classements en Annexe 2) sur l'ensemble de la période d'étude, qui est présentée ci-dessous. Cette discordance apparaît à partir du quatrième individu:

 

K>D>G>J>L>B>F>E>A>M>I>H>C>Q>P

 

Les extrémités des hiérarchies sont très similaires avec les deux types de classement. C'est pour les individus intermédiaires que l'ordre varie. Ainsi, Fluck "chute" de la quatrième à la septième place alors que Léo  passe de la douzième à la cinquième place.

   

Afin d'évaluer la liaison entre l'indice de dominance des mâles et leur succès reproducteur, le graphe suivant a été élaboré, mettant les deux variables en relation, pour les études de 1995, 1996 et 1997:

 


Figure 7: Succès reproducteur en fonction de l'indice de dominance

 


Pour les trois années, les individus ayant les plus faibles indices de Clutton-Brock n'ont généralement pas accès à la reproduction. En revanche, il y a globalement une augmentation du nombre de copulations avec celle de l'indice.

Cette année, l'ordre du succès reproducteur est: K>J>D=E=G=I=M (Annexe 3), ce qui ne correspond pas vraiment à la hiérarchie observée. J&B a un succès reproducteur supérieur à ce que sa place dans la hiérarchie laisserait présager.

 

Figure 8: Pourcentage de montes assurées par chaque mâle les 1 et 2 Novembre

 

L'ordre des individus classés en fonction de la quantité de montes n'est pas fortement lié à l'ordre hiérarchique. Si Kaki assure à lui seul un cinquième des montes, Fuck, bien placé dans la hiérarchie se retrouve parmi les derniers.

 

Résultats

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

 

Evolution du maquillage

  Le tableau de résultats concernant l'évolution du maquillage (cf. annexe 4) peut être transformé en histogrammes. Avant tout, précisons que les relevés du 16 Octobre ne seront pas pris en compte car il pleuvait et que la présence d'un maquillage de la poitrine a été notée pour chaque daim alors qu'il ne s'agissait que de saleté. De même, les relevés du 31 Octobre et du 1° Novembre ne semblent pas très logiques et ne seront donc pas pris en compte car du jour au lendemain, les treize daims maquillés à la poitrine ne le sont plus.

 

Figure 9: Evolution du nombre de daims maquillés

 

On constate qu'il y a globalement une augmentation du nombre de daims maquillés jusqu'au 27 Octobre, où il y a stabilisation. Le maquillage de la face et de la poitrine augmentent en même temps mais, les individus maquillés à la poitrine ne sont jamais moins nombreux que ceux ayant la face maquillée.

 

 

Figure 10: Nombre de jour de maquillage avant le rut pour chaque daim

 

Cette figure montre que Kaki est resté maquillé le plus longtemps. Il a de plus été le premier maquillé  (Annexe 4)

   

 

Résultats

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

 

Occupation de l'espace

   

Figure 11: Evolution de la répartition des mâles sur quatre portions du parc

 

L'observation indépendante de l'occupation de chaque portion n'apporte pas beaucoup d'éléments sinon que A1B1 est de plus en plus fréquenté, au détriment de A3B3. L'occupation de A2B2 reste constante et faible. En observant les portions deux à deux (A4B4,A3B3 et A2B2,A1B1),la moitié contenant le poste se dépeuple progressivement au profit de l'autre (comparaison pré-rut /rut :c²obs=155.6>>c²theo5%=3.84).

 

 

Tableau I: Comparaison de la distribution spatiale de trois dominants et trois dominés

  A1B1 A2B2 A3B3 A4B4    
  obs théo obs théo S   c²partiels
Kaki 12 21,38 78 68,6 90 5,39
Ding-dong 19 20,66 68 66,3 87 0,18
Gaston 15 20,19 70 64,8 85 1,75
Quetch 16 19,48 66 62,5 82 0,81
Pince 15   18,05 61 57,9 76 0,68
Cornu 42   19,24 39 61,8 81 35,3
S   119     382   501 44,1 = c²

L'hypothèse nulle Ho d'égalité des distributions est refusée avec un risque de 5%. Les plus fortes contributions au c² sont dues à Cornu qui est beaucoup plus en A1B1A2B2 qu'attendu et à Kaki, plus en A3B3A4B4 qu'attendu si la distribution était aléatoire. Les autres individus ont des distributions similaires.

 

Discussion

 

Introduction

Matériel et Méthode

Résultats

Discussion

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Conclusion

Références

Le mâle possédant un territoire de reproduction le délimite par des signaux olfactifs (phéromones), sonores (réements) et visuels. L'entrée d'un autre mâle sur le territoire entraîne automatiquement un affrontement qui aboutira à l'expulsion d'un mâle. Le groupe étudié au Parc de la Tête d'Or semble présenter un système d'appariement intermédiaire entre le poste et le groupe hiérarchisé : nous verrons qu'une hiérarchie s'établit entre les mâles du groupe pour la possession du poste.

Phénologie du rut

  En dehors de la période de reproduction, il y a relativement peu de comportements agonistiques ; ceux-ci augmentent globalement jusqu'au rut (figure 1) afin de déterminer quel mâle aura accès aux femelles. Trois types de comportements agonistiques se succèdent (figure 2). Cette succession se traduit par un accroissement de la violence des affrontements. Les premiers à se manifester (à partir du 16 octobre) sont les entraînements et ce sont aussi les plus nombreux. Ils permettent une mise en place grossière de la hiérarchie qui évitera des combats plus violents entre daims de force très différente. Les poursuites (à partir du 24 octobre), beaucoup moins nombreuses, représentent le deuxième type de comportement agonistique et exigent une dépense énergétique supérieure. Elles sont suivies des combats (le 30 octobre) qui s'intensifient avant la détermination du poste (le 1 novembre) et se maintiennent ensuite. Ces combats, parfois très violents, déterminent toujours un vainqueur et établissent le haut de la hiérarchie de la harde.

 
Kaki a l’assaut d’un concurrent trop ambitieux
(2 novembre)

 

  Les montes (figure 3) débutent approximativement en même temps que les poursuites et précèdent le rut de quelques jours. Elles seraient responsables du déclenchement de l'œstrus des femelles et constitueraient une étape clef de la mise en place du rut. Celui-ci débute avec les premiers accouplements (2 novembre) qui coïncident avec l'ovulation des biches. Les observations n'ayant pu se poursuivre après le 2 novembre, les données concernant le succès reproducteur sont incomplètes cette année et la durée du rut reste inconnue. Les années précédentes, les accouplements se sont étalés sur trois (1995) à sept jours (1996) (Annexes 5 et 6).

Le rut s'achève après les copulations, lorsque l'émission phéromonale des femelles désormais fécondées s'atténue. Les mâles cessent alors de les courtiser et de s'affronter.

 

Discussion

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

Hiérarchie

  Sur la harde du parc, plusieurs hiérarchies peuvent être établies selon qu'on se base sur le nombre d'interactions dominantes ou sur l'indice de Clutton-Brock. Les diagrammes de flux (Figures 4 ; 5 et 6) présentent les animaux classés selon le nombre d'affrontements gagnés. L'ordre ne correspond pas forcément à la hiérarchie car, des animaux ayant gagné de nombreux combats mais en ayant perdu davantage se retrouvent bien classés alors que leur taux de victoires peut être faible . Le diamètre des cercles, proportionnel à la fréquence des interactions, est, pour ces individus, plus important que pour les individus hiérarchiquement supérieurs. De plus, ce classement n'identifie pas les antagonistes. Si un mâle domine plusieurs fois un autre individu, il sera classé au même niveau qu'un mâle ayant dominé peu de fois de nombreux individus.

L'indice de Clutton-Brock fait la distinction entre les deux cas précédents en tenant également compte des relations eues par les animaux dominants l’individu considéré et par ceux qu’il domine. Quel que soit le mode de classement adopté, les extrémités sont identiques, ce qui montre que, pour ces individus, les dominances sont clairement établies. Ainsi, Kaki est incontestablement le mâle dominant. En considérant les diagrammes de pré-rut et rut (figure 4 et 5), on observe que la dominance de Kaki ne s'est affirmée qu’au moment du rut, c’est à dire lorsque ses intérêts reproducteurs étaient réellement en jeu. Pendant le pré-rut, il n'occupait que la huitième place (avec seulement trois interactions dominantes) et s'est imposé lors de la phase ultime du rut (42 affrontements gagnés contre seulement 2 perdus). Plusieurs hypothèses concernant l'établissement soudain de sa dominance sont émises. Les animaux, étant en relation en permanence, connaissent peut-être la supériorité de Kaki et ne le défient pas (un suivi individuel des comportements agonistiques depuis la naissance permettrait de vérifier cette hypothèse). Il se peut également que les affrontements impliquant Kaki se déroulent à notre insu, en dehors des périodes d'observations (notamment la nuit). Enfin, on peut soupçonner une stratégie consistant à s'effacer alors que les autres s'affrontent, permettant ainsi une économie d'énergie. Cette dernière hypothèse est confortée par le fait que Kaki a dû affronter  Pince et Momo (hiérarchiquement bas), sans être inquiété par les plus forts, occupés à se "battre" entre eux. Ce sont peut-être les phéromones émises par les femelles en œstrus qui accroissent son agressivité quand arrive le rut.

 

Corrélativement à sa position hiérarchique, Kaki a le plus fort succès reproducteur (3 copulations, Annexe 3). Les copulations du mâle dominant ont normalement lieu sur le poste, zone dont il interdit l'accès aux autres mâles et sur laquelle il rée et répand des phéromones. Les femelles s'y présentent et adoptent des postures caractéristiques : toutes dans le même sens, debout ou couchées, tête dressée, dos arrondi. C'est la femelle qui décide du moment de l'accouplement en barrant le chemin au mâle qui s'active sur son poste. Il lui renifle les parties génitales afin de connaître son état ovulatoire. S’il est positif, il y a saillie, sinon, il la stimule par une monte sans copulation. Ce comportement permet au mâle dominant, qui a accès à un grand nombre de femelles, de réserver sa semence à celles qui sont fécondables.

 


Kaki rée sur le poste alors qu’une femelle rumine, en position caractéristique

   

Etant donné le nombre d’animaux sur le parc (environ 150 bêtes, dont 15 mâles adultes), on aurait pu s’attendre à la formation d’un deuxième poste. L’espace restreint et, par conséquent,  la densité importante empêchent cette formation. Lors du rut, les animaux passifs ou dominés se replient en A1B1 et n’auraient plus qu’un refuge limité si un deuxième poste s’établissait. La distance réduite d’une extrémité à l’autre du parc et l’absence d’obstacle visuel mettraient les mâles aux postes en relation visuelle, auditive et olfactive en permanence, ce qui les pousseraient à combattre pour éliminer la concurrence.

 

Les mâles sub-dominants peuvent eux aussi avoir accès aux femelles mais, généralement, dans une moindre mesure et en dehors du poste. Momo a cependant copulé une fois sur le poste le 2 novembre, lors d'une trêve de la part de Kaki. Cinq autres mâles (G, D, J, E et I) ont également assuré quelques copulations ce même jour en divers lieux (Annexe 3). Il arrive que des sub-adultes parviennent à s'accoupler en trompant la vigilance des femelles occupées à boire ou à manger. Ces comportements sournois s'apparentent à des viols et, on peut penser qu'ils aboutissent à la fécondation d'un certain nombre de femelles, ce qui permettrait d'expliquer qu'ils aient été sélectionnés et qu'ils se soient génétiquement maintenus au fil des générations.

 

Le succès reproducteur semble globalement lié à l'indice de Clutton-Brock (figure 7). Les individus ayant un succès reproducteur nul ont tous un indice relativement faible (inférieur à deux). En revanche, la réciproque n'est pas vraie puisque des individus tels que Momo ont pu copuler. Il semblerait donc que la dominance ne soit pas le seul critère de choix du partenaire sexuel par les femelles. Le mâle dominant peut refuser de prendre une femelle s’il ne la sent pas fécondable ou qu'elle ne l'intéresse pas. Cette femelle peut se rabatte sur un autre mâle pour assurer sa fécondation. Le choix de ce mâle peut se faire d'après :

- son classement hiérarchique (D ; G et J bien que J ait assuré une copulation de plus que les deux autres), idée renforcée par le fait que tous les individus ayant un indice supérieur à deux ont eu accès aux copulations sur les trois dernières années.

- son obstination contre le mâle dominant (J, qui l'affronte neuf fois).

- l'originalité de ses bois (raquettes planes et peu découpées de D ; bois "veloutés" de M ou asymétriques de E et G). On peut citer, pour ce dernier cas, le concept de l'avantage du mâle rare.

Les mâles dominés ne refusent pas cette occasion de disperser leurs gènes tout comme les femelles qui ont plus intérêt à avoir une descendance génétiquement moyenne que pas de descendance du tout.

 

La quantité de montes n'est pas complètement liée à l'ordre hiérarchique. En revanche, elle reflète assez bien le succès copulatoire. Soit l'ordre des montes (figure 8) est déterminé par la cote des mâles, soit cet ordre est du au nombre de tentatives des mâles envers les femelles qui cèdent parfois.

 


Une copulation

 

Discussion

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

  Evolution du maquillage

 

Le maquillage est visuel et odorant. Pour le constituer, le mâle gratte le sol et urine sur la terre mise à nu et sur son plastron à l'aide de son pinceau pénien. Il se couche ensuite et s'enduit la poitrine de boue mélangée à l'urine chargée en phéromones prépuciales. Cette boue peut également servir au maquillage de la face, sur laquelle les phéromones préorbitales sont également étalées.

Le nombre de jours de maquillage (figure 10) est corrélé linéairement (R²=0.84, en ne prenant que la face, sur les onze premiers individus) au nombre de montes, donc l'ordre des mâles classés suivant leur durée de maquillage correspond à celui du succès reproducteur. Ainsi, plus un mâle est maquillé tôt, plus il copulera. Il est peu probable que ces variables sont directement liées, car cela supposerait que les femelles mémorisent les dates de maquillage. En revanche, il est possible que la durée de maquillage avant le rut et le succès reproducteur soient fortement liés à la hiérarchie réelle, légèrement différente de celle établie par l'indice de Clutton-Brock (R² maquillage-indice=0.5).

 

Si la durée de maquillage (figue 10) détermine la hiérarchie, cela suppose que les mâles connaissent leur place avant même la période de reproduction. On peut en fait supposer que la date de premier maquillage facial correspond aux "prétentions" des individus, qui étaient justifiées cette année (il serait bon d'avoir des données concernant les années précédentes pour savoir si c'est un accident). S'il était possible de reconnaître les mâles d'une année sur l'autre, nous pourrions savoir si la prétention des mâles est liée à la hiérarchie de l'année précédente.

 

Comme pour l'épinoche, qui considère, en période de reproduction, les poissons de couleur rouge comme des concurrents mâles de son espèce, le maquillage facial chez le daim est un signe que l'individu du même sexe a des prétentions hiérarchiques. Pourtant, cet ornement ne déclenche pas d'agressivité car Kaki, jusqu'au 27 octobre, n'a interagi que trois fois (pendant nos observations) malgré sa cohabitation avec sept mâles maquillés sur le parc (figure 9). Le maquillage peut aussi servir à attirer l'attention des femelles

 

Discussion

   Phénologie du Rut

   Hiérarchie

   Evolution du maquillage

   Occupation de l'espace

  Occupation de l'espace

 

En raison de la taille réduite du parc par rapport à la mobilité des animaux, ceux-ci peuvent passer d'une extrémité à l'autre très rapidement et l'absence d'obstacle visuel leur permet de surveiller l'ensemble de l'enclos à partir de n'importe quel point. De ce fait, les animaux accourent tous dès que les gardiens ou, plus fréquemment, les promeneurs les nourrissent. Ceci perturbe notablement la distribution qui est en moyenne plus importante en A4B4 (figure 11), où le nourrissage est le plus commode et où la mangeoire et l'abreuvoir sont disposés. Il s'avère que c'est également près des limites de ce secteur que le poste sera établi, en A3B3.

En s'approchant du rut, A3B3 est progressivement délaissé (figure 11), ainsi que A4B4 dans une moindre mesure (l’intérêt alimentaire reste élevé), au profit de A1B1, partie très calme du parc : peu d'affrontements, peu de visiteurs et beaucoup de femelles avec leurs petits. La fréquentation de A2B2 est constante et faible. C'est une zone sans arbre, ne semblant pas présenter d’intérêt pour les animaux. Il y a une baisse significative (c²=156.5>>3.84) de la fréquentation de la moitié A3B3A4B4 entre la phase de pré-rut et celle du rut –(l’utilisation du test de c² n’est pas rigoureuse car les échantillons ne sont pas indépendants)-. La comparaison de distributions de trois individus dominants et trois individus dominés (Tableau I) permet de voir qu’il n’y a pas de différence notable entre les individus inférieurs au mâle dominant (sauf pour Cornu qui occupe indifféremment les deux moitiés du parc). Le seul a être nettement plus représenté en A3B3A4B4 qu’attendu est Kaki qui chasserait les autres de cette moitié. Il n'est pas seul responsable de cette "désertion" puisque des travaux d'aménagement de l’enclos sont venus perturber les observations à compter de la semaine du 20 octobre, ce qui introduit un biais supplémentaire. En fait, les années précédentes, il y avait au contraire une augmentation de la fréquentation autour du poste jusqu’à la phase ultime du rut, à partir de laquelle le secteur était plus délaissé (à cause de la territorialité du dominant). On peut alors supposer  que l’influence des travaux sur le comportement des animaux n’est pas négligeable. De plus, l’empiétement du chantier sur l’aire A3B3 réduit sa surface et par conséquent sa fréquentation. Ceci peut être la cause de la forte baisse de fréquentation de A3B3 entre le 16 et le 22 octobre (figure 11).

 

 

Le poste était établi au même emplacement  en 1995 et 1996 mais, cette année, pour la mise en place du chantier, l’abreuvoir a été déposé sur cette zone. Le retard dans la détermination du poste (le 30 octobre cette année, entre le 23 et le 27 en 1996 et 1995) est attribué a ces perturbations ainsi qu’au stress causé par les travaux. En plus d’être en retard, le poste était très peu marqué et de limites imprécises, aux alentours de l’abreuvoir. Les causes de la localisation stable du poste au fil des années ne sont pas connues. On peut supposer une mémorisation visuelle de l’emplacement des années précédentes, à moins que le poste soit déterminé par un cadre général (Apollonio et al.), 1992)(zone dégagée, distance des ressources alimentaires, …) ou encore une rémanence d’odeurs phéromonales. L’incertitude peut être levée en déplaçant la couche superficielle du sol en dehors de la période de reproduction ou en déplaçant les animaux dans des parcs aux cadres différents.

 

 

Le 2 novembre, (seul jour de phase ultime de rut observé), Kaki était très irrégulier dans la défense du poste. Parfois, d’autres mâles pouvaient pénétrer sur le poste sans être inquiétés alors qu’à d’autres moments, le passage à une dizaine de mètres entraînait des poursuites. On peut penser qu’il s’agit soit d’un comportement normal : le mâle, qui s’est peu alimenté et beaucoup dépensé les jours précédents, aurait des baisses de vigilances passagères, soit, que cela est lié aux perturbations exceptionnelles de cette année et Kaki n’a pas la motivation suffisante pour assurer une défense soutenue du poste qui est peu fréquenté par les femelles.

 

L’absence des femelles au poste a contribué au retard des premiers accouplements (2 novembre contre 27 octobre en 1996 et 31 octobre en 1995) si on ne prend pas en compte la copulation du 27 octobre qui pourrait être une erreur d’appréciation vu sa précocité. En fait, cette copulation a lieu à la même date que les premières saillies des années précédentes  et le mâle qui l’a fait est peut-être le seul qui ne soit pas déréglé par les perturbations inhabituelles.

Conclusion

 

Introduction

Matériel et Méthode

Résultats

Discussion

Conclusion

Références

 

L’analyse des comportements est délicate car les observations ont été faites à des horaires variables. Les animaux ayant un rythme nycthéméral (phases de manducation, de repos ou de digestion, de forte activité, …), il serait préférable de les étudier à horaire constant pour voir l’évolution des comportements dans le temps sans que les variations quotidiennes interviennent. Les comportements agonistiques, par exemple, varient certainement moins entre deux journées consécutives qu’entre l’aube (ou le crépuscule) et le milieu de journée.

 

Références

 

Introduction

Matériel et Méthode

Résultats

Discussion

Conclusion

Références

 

-         Brazza et al., Rutting Behaviour of Fallow Deer, 1986

-         Apollonio et al., To lek or not to lek : mating strategies of male fallow deer, 1992

-         Clutton-Brock, Materetension, harasment, and the evolution of ungulates leks, 1991

-         Le monde animal en treize volumes, vol. XIII, editions Stauffacher, 1972

 

 


Image honteusement prélevée sur le logociel accompagnant mon modem Olitec
Sommaire général

©Vincent Berton

Un simple clic suffit...
Afrique de l'Ouest

...pour voyager un peu !
Afrique du Sud

Lien vers un rapport bibliographique d'une trentaine de page, basé sur des articles et ouvrages scientifiques... Pour passionnés seulement !
Cétacés

Les bases pour bien loger, nourrir, élever et apprivoiser son écureuil de Corée.
Ecureuil

Album photo. Retrouvez-y les clichés des parcs animaliers dans lesquels j'ai travaillé, mon élevage personnel et peut-être prochaînement les photos des voyages...
Portfolio

N'hésitez pas à m'envoyer un petit mot, la réponse est garantie, foi de Vincent (le délai n'est pas garanti)

v.berton@infonie.fr

BIOPASS  Navigation